La professionnalisation de la fonction achat vise désormais les achats hors productions et notamment les projets complexes et stratégiques. D’aucuns s’attendent à l’émergence du tarif en tant que seul critère décisionnel pour ce type d’achat. Pas si évident. Christophe Fereirra a vécu et vit toujours la relation client-fournisseur au quotidien, au sein de nombreux secteurs d’activité et pour différentes familles d'achats, dont les achats complexes. Actuel Responsable du développement fournisseurs chez un acteur majeur mondial des matériaux de construction et de chauffage, il nous livre son éclairage sur les attentes des acheteurs vis-à-vis des commerciaux en général, et de la proposition commerciale en particulier.
Casimir Joseph : la professionalisation des achats laisse penser que le prix va s’imposer en tant que critère de décision majeur pour les achats complexes ?
Christophe Ferreira : cette profesionnalisation à pour objectif d’optimiser les achats et donc les coûts. Le prix reste donc important. Mais le mythe de l’acheteur omnubilé par le prix s’estompe progressivement, notamment dans les achats hors production, face à des critères décisionnels parmi lesquels le niveau de service, le conseil, et le confort d'utilisation. D’autre part, la nature de certains achats, de type prestations intellectuelles par exemple, rend plus subjective la valorisation de la notion de qualité/prix. L’acheteur professionnel va s'intéresser au principe du mieux disant dans sa sélection de fournisseur et, dans ce contexte, la valeur ajoutée du support commercial, devient un élément important, au même titre que le prix.
C.J. : quelles sont les attitudes attendues par les acheteurs professionnels de la part des commerciaux ?
C.F. : Pour les commerciaux, il s’agit d’activer deux leviers : celui du niveau de service et celui des conditions commerciales. Les acheteurs professionels s’attendent ainsi à une implication du vendeur, au-delà d’une simple réponse à un cahier des charges, avec un partage d’information sur le projet et la remise d’une offre personnalisée. Le vendeur est invité à enrichir la vision du projet au travers de son expérience, et de présenter les points forts et faibles de son offre de maniére transparente. Cette transparence favorise ainsi une relation de confiance et mise sur une approche collaborative. Cette implication du prestataire en amont du projet améliore la définition des besoins qui reste aujourd'hui le point faible des projets d'achat hors production de type renouvellement du parc informatique ou contrats de de maintenance.
C.J. : Ces attentes des acheteurs s’appliquent-elles également à la proposition commerciale ?
C.F. : Tout à fait. La proposition commerciale est un support de la relation client-fournisseur et le commercial qui aura su s'investir dans le cycle d'achat ne peut se permettre ces erreurs classiques à l'instar des abberations, oublis volontaires et autres orientations tendancieuses souvent identifiées et sanctionnées… parfois définitevement. La qualité de communication d'une proposition commerciale est d’ailleurs considérée comme un indicateur d'une relation à développer avec un prestataire.
C.J. : Quelles sont, pour l’acheteur, les caractéristiques d’une bonne proposition commerciale ?
C.F. : Les acheteurs vont privilégier une proposition adaptée sur le fond et la forme. Attention aux propositions griffonnées sur un fax ou aux emails informels qui pulullent de fautes d’ortographes. La proposition commerciale doit être claire et précise dans sa formulation, structurée, introduite par la reprise des grandes lignes du projet du prescripteur, faisant référence au planning de réponse demandé, au planning de déroulement des opérations et aux options commerciales. Sur certaines familles d’achats complexes, il s’agit de s’adapter aux acheteurs, à l’oral mais également à l’écrit dans la proposition remise, en tenant un discours compréhensible et structuré, qui répond à leurs attentes. Ces attentes sont spécifiées dans le cahier des charges, un document officiel qui résulte des concertations internes et avis concernant le besoin précis à pourvoir. Attention donc aux hors-sujets en matière de proposition commerciale.
C.J. : Ces aspects qualitatifs sont–ils aussi importants que la proposition tarifaire ?
C.F. : En fait, ces aspects qualitatifs aident à la transparence de la proposition tarifaire et permet à l’acheteur de comprendre la composition du prix et de réaliser son benchmark. Plus la décomposition d’un coût sera opaque, plus la proposition sera considérée comme suspecte, même si le coût en bas de page est inférieur à celui de la concurrence. En effet, l’acheteur professionnel, dans le cas d’un investissement stratégique, va calculer le coût total de possesion de son achat ou investissement. Dans ce contexte, il doit détenir au travers de la proposition les élements de justification du prix demandé par les prestataires.
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